La visite officielle du roi Philippe et la reine Mathilde de Belgique se poursuit en République démocratique du Congo. Ce mercredi 8 juin, lors de son discours aux côtés du président Félix Tshisekedi, le roi des Belges a une fois de plus réitéré ses regrets pour les blessures du passé. "Le régime colonial comme tel était basé sur l’exploitation et la domination", a-t-il dit. "Ce régime était celui d’une relation inégale, en soi injustifiable, marqué par le paternalisme, les discriminations et le racisme. Il a donné lieu à des exactions et des humiliations", a encore déclaré le roi Philippe.
Mais le roi, comme on pouvait s’y attendre, n’a pas prononcé d’excuses officielles, qui pourraient entrainer des demandes de réparations. Cette visite du souverain belge soulève pourtant des questions à propos des relations qui existent aujourd’hui entre les deux pays.
Pour l’historienne Bénédicte Kumbi Ndjoko, il faut replacer les premiers regrets du roi belge, exprimés en 2020, dans le contexte mondial de l’époque qui était celui de Black Live Matters. "Quelque part, par rapport à toutes ces statues qui étaient déboulonnées dans le monde, la royauté belge a cru bon d’exprimer des regrets. Je pense aussi que le choix d’exprimer des regrets et non pas des excuses, à ce moment-là, était assez bien calculé, dans la mesure où lorsqu’on exprime des regrets, même pas un remord, cela veut dire qu’on a pu commettre une faute mais que quelque part on ne peut rien y faire", explique l’historienne à la Deutsche Welle.
Vers de nouvelles relations Belgo congolaise ?
A Kinshasa, cette visite est suivie de près. Pour l’artiste et écrivain Sinzo Aanza qui vit sur place, il est tout de même à déplorer que de nombreux politiques fassent de cette visite une occasion de marketing politique. Il insiste sur la lecture faussée de certains responsables qui estiment que l’économie congolaise aurait régressé depuis l’indépendance alors qu’à l’époque, il était surtout question d’une économie coloniale.
"Le Congo est un pays encore à bâtir, ce qui avait été bâti au moment de la colonisation c’était de l’investissement étranger. Et maintenant, il est plutôt question que le pays se concentre sur lui-même, sur les besoins de sa population. Le président Tshisekedi a souvent été critiqué pour les nombreux voyages qu’il fait pour ramener des investisseurs alors qu’il est avant tout question de voir comment un pays se développe avec ses propres moyens", estime Sinzo Aanza.
Contexte sécuritaire préoccupant dans l’Est
Cette visite se déroule dans un contexte sécuritaire préoccupant dans la partie est de la RDC placée sous état de siège depuis une année.
Pour Serge Welo, cadre au sein de la coalition Lamuka, le roi des Belges et sa délégation pourront constater les enjeux aussi bien économiques que sécuritaires auxquels font face les Congolais. "C’est aussi une bonne chose pour le souverain belge de venir toucher du doigt les réalités de la République démocratique du Congo tel que l’échec de l’état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri. Il va toucher du doigt la réalité des violations répétées des droits humains et celles de la Constitution", confie le militant de Lamuka.
Le couple royal doit encore passer la journée du jeudi 9 juin à Kinshasa, avant de se rendre à Lubumbashi (sud-est) puis à Bukavu, dans l'Est, où il visitera dimanche la clinique du gynécologue Denis Mukwege, colauréat du prix Nobel de la paix en 2018.
DW/CC