Les bandes dessinées dénommées « Miss Diva » de l’auteur Jérémie Nsingi et « Kuluna Girls » de Mola Boyika ou encore « Sambolé » de Jean-Paul Bindo ont été exposées pendant deux jours à l’académie des beaux-arts (Kinshasa). C’était le vendredi 10 septembre et le samedi 11 septembre dernier. Cette activité organisée par la Nouvelle Dynamique de la BD Congolaise ASBL a permis aux auteurs d’échanger avec les étudiants ainsi que les visiteurs autour de leurs œuvres et ce, dans le but de faire la promotion de la bande dessinée.

Vice-président de la Nouvelle Dynamique de la BD Congolaise, Mola Boyika, a dit ACTUALITÉ.CD, avoir conseillé la persévérance aux jeunes artistes dans ce métier.

« Le but est de faire la promo de la bande dessinée, vu que la BD est un support étudié ici à l’académie des beaux-arts et pour une première, il fallait le faire ici. Les étudiants ont répondu présent, il y en a qui nous ont demandé comment vivre avec cet art. La persévérance est primordiale, il faut avoir un mental solide, dans notre pays il y a un sérieux problème d’aide, de soutien », a-t-il dit.

Il justifie la bonne qualité de leurs bandes dessinées par l’impression faite en Chine où la main-d'œuvre est de loin moins coûteuse par rapport au coût local.

Les bandes dessinées « Miss Diva » et « Kuluna Girls » ont toutes les deux la vocation de faire rire pour captiver les lecteurs au-delà des leçons à tirer. Elles racontent les réalités congolaises, kinoises particulièrement. « Kuluna Girls », dans sa version longue, se déroule dans la partie Est de Kinshasa dite Tshangu. Elle parle des filles qui se comportaient de manière très surprenante à chaque agissement. « Miss Diva » pour sa part, dans son numéro 1 et 2, a la particularité de réunir plusieurs personnalités du monde comme Barack Obama, Mugabe, Maître Gim’s, Jamel Debouz, Will Smith, Samuel Eto’o, DJ Arafat, Batista, Michael Jackson, Bruce Lee. etc. dans une même histoire, certaines se retrouvent à Kinshasa avec différents rôles que leur vraie vie.

Emmanuel Kuzamba



L’Association des jeunes responsables (AJR) a lancé le week-end dernier, à Bandundu dans la province du Kwilu, une campagne de sensibilisation dénommée « Mwasi Lata Malamu », en français, « Femme habille-toi décemment ». 

Cette campagne, qui se fait dans les instituts supérieurs et autres lieux publics, a pour but de « réduire la recrudescence des infractions liées aux violences sexuelles ». 

Prospère Gata Matambu, responsable de cette structure citoyenne, explique que l'article 176 du code pénal congolais interdit tout comportement visant à outrager les mœurs, d’où l’initiative de cette campagne : 

« Dans le souci de battre en retraite la recrudescence des infractions liées aux violences sexuelles, nous voulons que, les femmes reviennent dans le bon sens. Nous ne voulons plus voir la femme exhiber ses parties intimes dehors, se promener presqu’à moitié nue pendant que ce comportement est fustigé par l’article 176 du code pénal congolais livre 2, qui stipule d’ailleurs que quiconque aura publiquement outragé les mœurs, par des actions qui blessent la pudeur, sera puni d’une servitude pénale de huit jours à trois ans et d’une amande ou l’une de ses peines seulement ». 

Prospère Gata Matambu ajoute que la loi va s’appliquer contre toute celle qui aura violé cette disposition. 

« Le message fort à la population, surtout à la femme de Bandundu est de s’habiller décemment de se comporter au regard de la loi. La loi est dure mais c’est la loi. Que la population ne puisse crier au scandale ou la tracasserie policière, non. C’est un comportement qui est déjà réprimandé dans nos lois du pays. Nous sommes persuadés que le patron de la police (sera) sur terrain pour mettre la main à quiconque aura outragé publiquement nos mœurs », a-t-il renchérit.

Radio Okapi/CC



Annulée l'an dernier en raison du coronavirus, la 13ème édition du Festival des musiques urbaines d'Anoumabo (Femua), organisé par le célèbre groupe ivoirien Magic System, s'est terminé dimanche &é septembre après un concert de la star congolaise Koffi Olomidé qui a tourné court dans la nuit.

Programmé comme le concert phare de la soirée de samedi, Koffi Olomidé devait se produire aux alentours de 4h du matin (locales et GMT), à Abidjan.

En raison d'une série de retards, il n'est finalement monté sur scène que vers 6h alors que le jour se levait et que la foule s'était largement amaigrie, a constaté un photographe de l'AFP.

Visiblement agacé, la légende de la rumba congolaise, très populaire en Afrique francophone, a écourté sa prestation qui n'aura duré qu'une vingtaine de minutes.

Avant Koffi Olomidé, le rappeur français d'origine ivoirienne Vegedream, connu notamment pour le tube de la Coupe du Monde 2018 "Ramenez la coupe à la maison", s'était produit sur la scène principale du Femua.

D'autres artistes étaient présents tout au long de la semaine, comme le Français Keen'V, l'artiste congolaise Céline Banza ou le Sénégalais Pape Diouf.

"Quand tu ne connais pas le terrain, c'est toujours compliqué de jouer. Là, je trouve les gens toujours souriants, toujours tous sympathiques. On est dans un bon mood", se réjouissait Keen'V, interrogé par l'AFP.

"Je trouve que la musique a une place hyper importante en Côte d'Ivoire, beaucoup plus qu'en France je trouve et je m'y sens bien", a-t-il ajouté.

L'affluence était au rendez-vous tout au long de la soirée de samedi, malgré une hausse des cas de Covid-19 depuis quelques semaines en Côte d'Ivoire.

Un centre de vaccination a d'ailleurs été installé au coeur du festival et plus de 1.000 personnes avaient été vaccinées, selon Serge Yao, superviseur du site.

Le festival s'est achevé donc dimanche avec une série de concerts délocalisés à Grand-Bassam, une station balnéaire à une heure d'Abidjan.

Le Femua s'est imposé comme l'un des plus grands festival de musique en Afrique, notamment grâce à la notoriété internationale de Magic System.

"La beauté du Femua, c'est de permettre à des artistes qui ne sont pas connus de partager la même scène que ceux qui sont connus. C'est une plateforme d'échange, de partage d'expérience, voir aujourd'hui un Koffi Olomidé jouer sur la même scène qu'un Joël Sebunjo (artiste ougandais, ndlr), qui n'était pas connu en Côte d'Ivoire je crois que c'est quelque chose de formidable", a expliqué à l'AFP, A'Salfo, le leader de Magic System.

avec AFP



Le chanteur de rumba congolaise Fally Ipupa est devenu mardi ambassadeur national du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) en République démocratique du Congo (RDC), a rapporté la radio onusienne Okapi. L’acte d’agrément d’une durée de deux ans renouvelables, signé par la star congolaise et le représentant de l’Unicef en RDC, est entré en vigueur mardi à l’occasion du début de la semaine mondiale de l’allaitement maternel.

Initiateur et promoteur d’une fondation qui porte son nom et dont l’objectif est de venir en aide aux démunis, Fally Ipupa a exprimé sa joie de travailler pour l’intérêt des enfants. « Ça fait plaisir, ça m’engage encore un peu plus. Avant, je le faisais sans être ambassadeur, mais je le faisais quand même avec beaucoup de bonne volonté », a-t-il déclaré selon Radio Okapi, parrainée par l’Onu.

« On a tous été enfant. Et en tant que parent, je pense qu’on est obligé de protéger les enfants, de leur venir en aide, de s’en occuper et de ramener un geste, un sourire », a affirmé Fally Ipupa.

Le musicien se dit déterminé à travailler sous la direction de l’Unicef en RDC. « Je pense qu’aujourd’hui, être artiste c’est bien, mais aider c’est encore plus cool. Donc, on aura toujours le temps. On essaie de faire les choses bien, bénévolement, pour aider. C’est important », a-t-il ajouté.

Ce chanteur de rumba congolaise est parfois accusé par des opposants de la diaspora d’être proche du pouvoir congolais et ses concerts à l’étranger sont parfois émaillés d’incidents.

source: lalibre



Durant quatre siècles d’échanges avec l’Europe, l’art africain a été instrumentalisé, catégorisé de façon simpliste, voire oublié : l’artiste congolais Sammy Baloji présente aux Beaux-Arts de Paris une œuvre qui « réactive la mémoire » et « se réapproprie » cette histoire. « C’est l’espace vide de l’Histoire qui m’intéresse. Je veux faire parler ces espaces oubliés », explique à l’AFP l’artiste de 41 ans, originaire de Lubumbashi (sud de la République démocratique du Congo), qui dit travailler sur « les généalogies ».

Sammy Baloji a gravé sur sept plaques de bronze (« Negative of luxury cloth ») les motifs des tissus et coussins que le roi du Kongo – un royaume de l’Afrique du Sud-Ouest – envoyait au XVIe siècle vers le Portugal et le Vatican comme cadeaux diplomatiques.

Sur ses tableaux aux couleurs vives et à l’énergie cinétique (« Wunderkammer, work in progress »), Sammy Baloji a repris les fils verticaux des métiers à tisser traditionnels.

« Le tissage est une des techniques que nous partageons tous, et même l’ordinateur fonctionne sur son système binaire », dit l’artiste.

Suspendues au-dessus de ses œuvres, quatre « tentures des Indes », des tapisseries du XVIIIe siècle de la Manufacture des Gobelins, représentent des personnes noires dans des univers fantasmés.

La recherche sur l’histoire oubliée, Sammy Baloji l’a faite dans des archives et auprès des musées. Au XVIe siècle, le Kongo était un riche royaume sur l’Atlantique, dont le territoire se partage aujourd’hui entre Congo-Brazzaville, République démocratique du Congo et Angola.

Les échanges entre son roi converti au christianisme, le Vatican et le Portugal, les allées et venues des marchands et des jésuites : ce relatif équilibre sombre avec le commerce triangulaire et la déportation vers l’Amérique des populations. Et les savoirs se perdent.

Pourquoi Sammy Baloji travaille-t-il le bronze ? C’est que l’extraction du cuivre – composant du bronze – l’a accompagné depuis sa naissance en 1978 à Lubumbashi, non loin de l’usine de la Gécamines, société qui administrait les mines depuis l’époque coloniale.

« Le cuivre, ça avait commencé avec la production de croix à destination de l’Europe », raconte-t-il.

Les Beaux-Arts ont ouvert leur plus belle salle à cet artiste qui s’impose sur la scène contemporaine pour sa création puissante soutenue par une réflexion sur la colonisation.

Cet ancien pensionnaire de la Villa Médicis à Rome, qui a participé à la Biennale de Venise et à la Documenta à Cassel, n’aime pas être catégorisé « artiste africain ». Il a exposé à Paris (récemment au Grand Palais), New York, Washington, Londres, Sydney et en RDC, creuset d’une création foisonnante.

Sammy Baloji a enquêté sur l’itinéraire des objets venus en Europe. Beaucoup, amenés par les jésuites, ont été exposés dans les cabinets de curiosité à la Renaissance, avant de perdre leur identité propre dans des musées d’histoire naturelle et des expositions universelles, explique-t-il.

A l’exposition de 1897 organisée à Bruxelles par le roi Léopold II, en pleine colonisation belge, « l’Art nouveau » va ainsi intégrer beaucoup de motifs Kongo.

« À un certain moment, l’homme noir va devenir un objet ethnographique. L’ethnographie, c’est la science coloniale. L’histoire de l’art se crée alors autour d’une vision eurocentrique », souligne-t-il.

C’est seulement dans les années 1920 que naîtra le concept d' »art nègre ».

Interrogé sur les restitutions, l’artiste, même s’il est favorable à l’idée, répugne à entrer dans un débat complexe. « En Afrique », note-t-il, « les musées fonctionnent d’après des scénographies héritées de l’Europe ».

L’exposition, dans le cadre de la « Saison Africa2020 », est aussi présentée avec le Festival d’Automne, qui devait avoir lieu de décembre à janvier et que le Covid a repoussé à juin-juillet.



Nicolas Bedos n’y va pas de main morte: le réalisateur reprend la franchise parodique à succès « OSS 117 » avec un nouvel opus, « Alerte rouge en Afrique noire », qui s’attaque par la caricature au racisme comme au politiquement correct.

Dans ce nouveau volet des aventures de l’agent secret français, en salles mercredi, le génie comique de Jean Dujardin, qui l’incarne, est intact. L’acteur oscarisé enfile pour la troisième fois le costume rétro de l’espion le moins doué du renseignement tricolore.

Au programme: cascades bouffonnes, parodies de scènes de James Bond et saillies racistes brut de décoffrage à prendre au troisième degré.

« J’aime être un agent secret, tourner en extérieur, faire mes petites cascades de cinéma. OSS, c’est ça: le fond et la forme », a confié à l’AFP Jean Dujardin, avant la présentation du film en clôture du 74e Festival de Cannes.

Dans « Alerte rouge en Afrique noire », 117 se voit confier une nouvelle mission, aider un dirigeant africain (le pays n’est pas précisé, peu importe aux yeux d’OSS et de ses supérieurs…) à mater une rébellion avant des élections présidentielles, bien entendu jouées d’avance.

Mais Hubert Bonisseur de la Bath, tiré à quatre épingles et qui en est toujours à saluer le petit personnel féminin d’une tape sur la fesse, prend un gros coup de vieux: on lui adjoint les services d’un jeune ambitieux, OSS 1001 (Pierre Niney).

Fatou N’Diaye est Zéphyrine la « méchante », femme du président et cheffe des rebelles, dans le lit de laquelle finira, évidemment, OSS 117.

– Sans filtre –

Douze ans après la sortie de « Rio ne répond plus », l’humour « OSS 117 » sonnera-t-il de la même façon, dans une société où les questions de racisme, d’héritage colonial et de remise en cause du patriarcat sont devenues centrales? Les deux précédents volets, signés Michel Hazanavicius, jouaient eux aussi avec l’exotisme et les clichés. « Alerte rouge en Afrique noire » attaque frontalement ces sujets qui fâchent.

C’est Nicolas Bedos, 42 ans, qui a pris les commandes pour cette adaptation au rythme enlevé. Humoriste, acteur et écrivain, avec « OSS 117 » il signe son troisième film après « La Belle époque » et « Monsieur & Madame Adelman ».

Engagé à gauche, le fils de Guy Bedos n’a pas peur des positions clivantes et a travaillé avec le même scénariste que pour les précédents opus. Le film se déroule dans la France de 1981, à la fin du mandat de Valéry Giscard d’Estaing, et manie un humour sans filtre avec Jean Dujardin en mâle blanc vieillissant, balourd et dépassé, qui s’embourbe dans le politiquement correct.

« Ce n’est pas le politiquement incorrect, qui sous-entend l’envie de bousculer, de choquer, de faire mal, auquel je tiens. C’est à la liberté de l’humour », a expliqué à l’AFP Nicolas Bedos: « On fait des films (…) pour les spectateurs, pas pour Twitter! ».

– Tintin au Congo –

#MeToo, « cancel culture », cet opus multiplie les clins d’oeil aux débats du moment, avec un héros qui révise ses fondamentaux dans l’avion, en relisant « Tintin au Congo ».

Prévenu par son supérieur avant de débarquer sur le continent du fait que « nos amis voient du racisme partout », l’espion en fait des tonnes dès son arrivée à l’hôtel, refusant ainsi qu’un groom noir lui porte ses valises en lançant: « Mais qu’est-ce que c’est que ces préjugés? ».

Le virilisme aussi en prend pour son grade, toujours en mode caricature appuyée, avec un OSS 117 macho et homophobe, réduit à l’impuissance sexuelle et dépassé par 1001, le personnage de Pierre Niney, métrosexuel en diable.

Evidemment, ce grand voyage sera l’occasion de leçons de vie pour le personnage de Dujardin, convaincu au départ que « les Africains sont joyeux, sympathiques, et dansent bien ».

« OSS 117″ trouvera-t-il son public? Les précédents volets du cousin français d' »Austin Powers », adapté d’une série littéraire signée Jean Bruce inaugurée dès 1949, ont placé la barre haute: les deux premiers épisodes ont réuni chacun à leur sortie plus de deux millions de spectateurs.



Impossible de terminer (ou commencer) l’année sans vous proposer une (dernière) petite danse. On l’appelle La Danse du Vilain mais on parie qu’elle vous plaira. Elle est au coeur du dernier roman d’un enfant du Congo : Fiston Mwanza Mujila, rendu célèbre par son Tram 83, paru en 2014.

Vous accepterez bien une dernière / première danse ? Nietzsche pensait qu’une journée sans danse était une journée perdue et Platon en soulignait la dimension éducative. Qui oserait contredire ces deux-là ? D’autant que la danse évoquée ici marie le jazz et la rumba, les beautés du Congo et de l’Angola dans le sillage de la fameuse Tshiamuena, « Madone des mines de Cafunfu » .

Entre trafic de pierres précieuses et boîtes de nuit frénétiques, entre Angola en pleine guerre civile et Zaïre au bord de l’explosion, Fiston Mwanza Mujila reprend son exploration de la débrouille déjà à l’oeuvre dans Tram 83. Toute la vitalité et le charme de son premier roman sont convoqués de plus belle pour cette nouvelle chorégraphie imaginée dans une ambiance de fin de règne (celle du président Mobutu), entre dictature et guerre civile, entre corruption et rébellion.

Son roman est bâti autour de la figure de Tshiamuena, dite la Madone des mineurs, une « sorcière » aux vies et aux pouvoirs multiples qui lui a été « inspirée » par sa grand-mère. Une « forte femme » qui tenait un bar dans un quartier populaire de Lubumbashi, dans la commune de Katuba. Enfant, il y a passé de longues heures, chaque été, à ranger les chaises et les caisses de bière en écoutant un flot ininterrompu de musique congolaise. Pas étonnant que le bar de son enfance se retrouve au coeur de ses deux romans à la gouaille incomparable. Pour compléter le tableau de son nouveau récit, l’auteur convoque une autre des idoles de sa jeunesse, le célèbre Papa Wemba, roi de la rumba congolaise…

A défaut d’être devenu musicien, Fiston Mwanza Mujila joue avec les mots comme avec les sons

Installé depuis une dizaine d’années à Graz, cité universitaire au sud-est de l’Autriche, Fiston Mwanza Mujila, 39 ans, est originaire de Lubumbashi, capitale minière de la République Démocratique du Congo (RDC), raison pour laquelle il comprend si bien le destin et les nombreux démêlés de l’Angola voisin.

« J’ai toujours voulu être saxophoniste mais cela n’a pas été possible parce que dans ma région, il n’y avait pas un seul café-jazz, pas d’école de musique, pas un seul saxophone… Alors je me suis retrouvé avec mes mots. Quand j’écris, je travaille avec les mots comme des notes, comme si c’était une partition » confiait-il à La Libre dès 2011.

« Ces pages ont été écrites souvent la nuit, bercées par le jazz sud-africain et la rumba zaïroise » écrit-il dans son nouveau roman. La rumba qui « participe de l’identité congolaise et unit le pays ».

Laissant de côté son rêve de devenir saxophoniste, Fiston Mwanza Mujila a opté pour la poésie mais la musique est restée au coeur de sa vie.
« Je suis un poète qui écrit des romans », dit-il. On ne s’étonnera pas qu’il joue à ce point avec les mots, les faisant rouler sur sa langue pour mieux les déverser ensuite à travers ses récits foisonnants.

Chantre des répétitions et des énumérations qui sonnent, il déclame d’ailleurs souvent sa prose en compagnie de musiciens. Aujourd’hui, ce jazz déjà très présent dans Tram 83, Fiston Mujila le convoque sur scène. En Autriche, il s’est produit avec un batteur et un saxophoniste. En Allemagne, il était récemment entouré de musiciens de jazz, refermant ainsi la boucle du son.

Tram 83 et La Danse du Vilain partagent son goût du récit burlesque et l’attention accordée au « petit monde » qui se croise dans les bistrots, réuni par l’amour de la musique, le sens de la débrouille et le goût de la fête.

Cette fois, Fiston Mwanza Mujila concentre toute son attention sur les gamins de rue, petit peuple qui règne sur la nuit, chauffé par la colle, chassé par la misère et la guerre. Un monde organisé, hiérarchisé, avec ses rituels et ses spécialités (vols, chantage, mendicité) d’où émergent des personnalités étonnantes: Molakisi, Sanza, Ngungi… Une humanité qu’il décrit avec tendresse et soin dans son nouveau roman luxuriant, publié aux Editions Métailié.

Karin Tshidimba



Le Congolais Blaise Ndala, 48 ans, qui vit au Cananda depuis 2007, publie son troisième roman en pleine effervescence sur le colonialisme belge.

C’est un livre qui tombe pile au bon moment. Alors que les nombreux meurtres aux Etats-Unis de citoyens noirs par des policiers blancs y ont suscité le mouvement « Black Lives Matter », en 2020, des activistes en Belgique ont surfé sur cette déferlante pour relancer leurs protestations contre Léopold II et la colonisation du Congo. C’est au milieu de cette effervescence que paraît le roman de Blaise Ndala, dont la pierre angulaire est le spectacle prévu par l’Exposition universelle de 1958, à Bruxelles, d’un « village congolais » animé par des personnes vivantes.

Ce spectacle, jugé aujourd’hui « dégradant » pour les Congolais de ce faux village, avait suscité des protestations à l’époque. Blaise Ndala le corse en supposant qu’une des jeunes femmes présentes s’y trouve après avoir été enlevée à Léopoldville par un Belge peu scrupuleux, à la suite d’amours interdites. Car l’héroïne est princesse kuba et, comme telle, ne pouvait priver son père du privilège d’établir une alliance avec l’ethnie des Lundas en la mariant à l’héritier de leur empereur.

Le pouvoir des chefs traditionnels

Cette intrigue permet à Blaise Ndala de revenir sur une des frustrations des indépendances africaines, au Congo comme dans d’autres pays: la souveraineté fut alors confiée à de nouveaux venus, bons élèves du colonisateur – appelés au Congo belge « les évolués » – au lieu d’être rendue à ceux qui en avaient été privés par la colonisation, les chefs traditionnels, ceux qui savaient comment on exerce le pouvoir. Les voici dépouillés à nouveau, cette fois au profit de « copies des blancs ».

Comme souvent, lorsque cette thèse est exposée, est passée sous silence la multiplicité de chefs dépouillés; entretemps, leurs royaumes et empires ont été agglomérés et aucun des anciens potentats ne saurait les gouverner tous, ni l’ensemble qu’ils sont devenus. Mais ce thème est l’occasion, pour Blaise Ndala, de rappeler, du ton ample de l’épopée, une notion qui semble aujourd’hui disparue au Congo alors qu’elle fit agir, se surpasser et se sacrifier ceux pour qui elle comptait: « L’honneur. Ce qui fait se tenir debout ».

Si le roi des Kubas avait reconnu la souveraineté du roi des Belges, il voulait « faire du royaume hérité de ses aïeux un îlot de fierté au cœur de la province du Kasaï. Continuer de se soumettre aux lois de l’administration coloniale sans renoncer à la dignité ». Il disait: « Le coq a deux genoux, certes, mais personne ne l’a jamais vu les plier à la manière du chien pour quémander une graine de maïs ».

Le rôle de Wendo Kolosoy

Le roman est plutôt bien écrit, malgré quelques anachronismes verbaux et un récit parfois filandreux. Il fait intervenir dans l’intrigue la principale vedette de la rumba congolaise des années 50, l’inoubliable chanteur Wendo Kolosoy, ce qui devrait contribuer au succès du livre.

Dans son désir de plaire au lecteur d’aujourd’hui, cependant, l’auteur va trop loin. Il place ainsi dans la bouche du roi kuba mourant un plaidoyer pour les migrants désireux de gagner l’Europe, totalement incongru dans le récit. Et transforme le fameux match de foot du 4 janvier 1959 entre deux équipes de Léopoldville, VClub et Mikado – il joua un rôle dans les émeutes de ce jour, qui décidèrent Bruxelles à octroyer l’indépendance à sa colonie – en confrontation entre « indigènes qui s’étaient présentés nu-pieds sur le gazon » et « une équipe blanche constituée de maîtres prêts à renvoyer l’adversaire à sa rumba quotidienne. Une rencontre qui vit la fourmi noire ne faire qu’une bouchée de l’éléphant blanc ». Nous voilà tombés au niveau du jeu vidéo. Comme si l’histoire du Congo n’était pas suffisamment extraordinaire.

« Dans le ventre du Congo »

de Blaise Ndala

A Propos

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Ali Kalonga

Directeur de la Rédaction

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