Lors du mini-sommet consacré à la crise sécuritaire dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), le président Tshisekedi n’a pas mâché les mots pour dénoncer, pour la énième fois, l’agression de son pays par le Rwanda.
Sans vaciller, il a présenté vendredi 16 février 2024 des éléments démontrant, selon lui, l’implication de Kigali dans l’insécurité qui secoue la région du Kivu.
Devant ses pairs africains réunis à huis clos à Addis-Abeba, le dirigeant congolais a renouvelé ses accusations contre Kigali. « Le président Tshisekedi a démontré l’implication du Rwanda dans l’entretien de l’insécurité et le pillage des richesses dans l’Est du Congo », a indiqué la présidence congolaise après l’intervention.
Cette mise en cause directe du Rwanda intervient alors que la tension reste vive entre les deux pays voisins autour du conflit armé opposant l’armée congolaise aux terroristes du M23. Kinshasa accuse depuis des années le gouvernement rwandais de soutenir cette rébellion, malgré les dénégations répétées de Kigali.
Le Président Tshisekedi a dénoncé devant ses homologues africains réunis, ce qu’il considère être « les mensonges et manipulations » du Rwanda, selon des propos rapportés par le ministre congolais de la Communication
« Déconstruire les mensonges et manipulations, attaquer le mal, rétablir la vérité avant de parler de paix. Le Président a tout dit en face, devant témoins et sans ambages », indique Patrick Muyaya.
Selon lui, le chef d’État congolais a opposé un veto à toute négociation avec les terroristes du mouvement du 23 Mars (M23). De plus, il a réitéré ses accusations contre Kigali de poursuivre « la guerre pour continuer le pillage » des ressources de la RDC.
« Cette guerre n’est pas une invention de la RDC.Une guerre pour continuer le pillage de mon pays et faire le bonheur du Rwanda et de ses complices. On ne peut pas prétendre devenir protecteur d’une communauté d’un pays voisin. On ne va jamais négocier avec le M23. Je veux la paix mais pas à n’importe quel prix », a écrit Patrick Muyaya paraphrasant le président Tshisekedi.
Lors de ce mini sommet organisé par le médiateur angolais Joao Lourenço, les dirigeants congolais et rwandais étaient présents mais ne se sont ni entretenus encore moins salués.
Suggestion d’un dialogue direct entre Tshisekedi et Kagame
D’après une dépêche de la cellule de communication de la présidence RD Congolaise, le président angolais Joâo Lourenço a indiqué dans son intervention que cet événement avait pour objectif de « réfléchir ensemble pour obtenir un cessez-le-feu entre la RDC et le M23, et tenter un dialogue direct possible entre les Chefs d’État du Rwanda et de RDC parce que la situation se détériore ».
João Lourenço a par ailleurs souligné sa volonté de remettre sur les rails, le processus de pacification de l’Est de la RDC, qui semblait avoir enregistré des avancées avec le recul du mouvement terroriste M23, avant un récent revers.
« Malheureusement, nous avons assisté à un revers majeur qui a conduit à la reprise des hostilités (…) tant pour les populations locales que pour l’économie du pays », a-t-il déploré.
Face à cette régression qui pourrait « atteindre des proportions dangereuses », le président angolais craint qu’elle n’affecte non seulement la RDC et le Rwanda, mais aussi toute la région des Grands Lacs voire la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), dont fait partie la RDC.
Ainsi pensé, il a proposé à ses homologues africains réunis à Addis-Abeba « de voir quelles mesures nous pouvons prendre pour renégocier un cessez-le-feu entre les autorités de la RDC et le M23 »
Au cours de cette réunion organisée à l’initiative de l’Union africaine, plusieurs pistes ont été débattues comme le retrait de de ce mouvement terroriste des zones occupées dans le Nord-Kivu et le lancement d’un processus de cantonnement.
Une réunion du Conseil de paix et sécurité
Outre ce mini-sommet, Félix Tshisekedi a pris part ce week-end au 37ème sommet de l’UA et à une réunion du Conseil de paix et sécurité. Ceci a été également l’occasion pour lui de mobiliser la communauté internationale face à la dégradation de la situation sécuritaire à l’Est du pays.
Présidée par Joao Lourenço, président angolais et médiateur désigné par l’UA, la première réunion précédant le huis clos avait rassemblé une délégation d’une cinquantaine de personnes, dont 5 Chefs d’État notamment Félix Tshisekedi, Paul Kagame, William Ruto, Cyril Ramaphosa et Joao Lourenço lui-même.
Ce mini-sommet intervient alors que de nouveaux combats font rage dans la province du Nord-Kivu entre l’armée congolaise, les groupes armés Wazalendo et les rebelles du M23, soutenus selon Kinshasa par Kigali. Il s’agit de la première tentative africaine de médiation réunissant physiquement Tshisekedi et Kagame.
Les conclusions devraient être officialisées dans un communiqué final dans les prochaines heures.