Cinq femmes métisses (nées des Belges de l’administration coloniale) ont cité l’État belge en justice pour répondre de la politique raciale menée pendant sa tutelle sur le Congo entre 1908 et 1960, a annoncé dimanche l’agence Belga.
«À la base de cette action, dont le procès a lieu lundi et mardi, se trouvent cinq femmes qui ont été victimes de l’enlèvement et de la ségrégation des très jeunes enfants métis au Congo. Elles demandent que la justice condamne l’État belge pour avoir organisé ce système violent de discrimination raciale aux lourdes conséquences sur leur vie», a fait savoir l’Agence de presse belge.
Cette plainte, qui est une première du genre en Europe, avait été traitée en première instance en 2021. Le tribunal civil de Bruxelles avait rejeté la demande des cinq requérantes, défendues par Me Michèle Hirsch, Me Christophe Marchand et Me Nicolas Angelet entre autres.
Les cinq femmes, qui sont nées au Congo belge entre 1946 et 1950, attaquent l’État belge en responsabilité civile pour crime contre l’humanité, réclamant des dommages et intérêts pour l’important préjudice causé lorsqu’elles ont été enlevées. Elles sollicitent aussi la production d’archives concernant leurs origines et leur histoire.
Nées de l’union des Belges et des Congolaises durant la période où le Congo était colonie belge, elles ont été arrachées à leur foyer pour être placées de force dans des orphelinats, comme la plupart de très jeunes enfants métis, a expliqué Belga.
Loin d’être un cas isolé
Selon l’agence belga, des documents officiels issus des archives coloniales, dévoilés par les avocats des plaignantes, ont indiqué que des rapts d’enfants métis ont été organisés par des officiers de l’État belge et mis en œuvre avec le concours de l’Église.
Les fonctionnaires de l’État colonisateur recevaient des instructions pour organiser les enlèvements des enfants issus d’une union mixte, en contraignant les mères à se séparer d’eux.
Les enfants étaient placés dans des missions catholiques qui se trouvaient sur le territoire du Congo belge, mais aussi au Rwanda et au Burundi, loin de chez eux. Dès leur plus jeune âge – de quelques mois à cinq ans – les métis ont ainsi été arrachés à leurs mères et à leurs villages par le recours à la force, aux menaces ou à des manœuvres trompeuses alors que ces enfants n’étaient ni abandonnés ni délaissés, ni orphelins.
En 2018, Charles Michel, alors Premier ministre, avait présenté ses excuses au nom de l’État belge pour l’enlèvement forcé et la ségrégation ciblée des enfants métis au Congo, au Rwanda et au Burundi. Pour les plaignantes, ces excuses sont une première étape, la seconde étant de réparer le dommage causé.
ACP/C.L./CC