A l’occasion de la quatrième journée africaine des droits d'auteurs et de la gestion collective, célébrée mardi 14 septembre dernier, l'administration des droits d'auteurs au Congo (ADACO), en plus de se dire inquiète de la situation dans le pays, demande de nouveau la libéralisation de ce secteur qui jusqu’ici donne le monopole à la Société Congolaise des Droits d’Auteurs (SOCODA). C’est ce qu’on peut lire dans une déclaration distribuée à la presse.
‘‘Aujourd'hui, RDC, l'état actuel de la gestion collective des droits d'auteur est une vaste escroquerie. Pour mieux penser l'avenir et une saine gestion des droits, ADACO propose la libéralisation du secteur, donc la fin du monopole ; ce vestige Mobutiste du Parti unique qui survit avec ses tares amplifiées. Les ayants-droits et créatifs conscients refusent de rester passifs et exigent la démonopilisation pour assainir le milieu. Ne pas en tenir compte c'est de refuser de comprendre les raisons réelles qui font la faillite du droit d'auteur tel que gérée actuellement, et depuis des décennies, par des gens n'ayant aucune intégrité ni connaissance de la gestion collective des droits d'auteur’’, indique le communiqué.
Et d’ajouter que dans une RDC en pleine mutation démocratique, engagée dans une transition pour mieux asseoir les règles de bonne gouvernance, de l'état de droit, ce monopole n'a plus de sens ni lieu d'être. La gestion collective des droits d'auteur touche toutes les questions liées à la création artistique, et à l'action culturelle de la Nation congolaise. La gestion de la Socoda intéresse et concerne toutes disciplines artistiques et tous les auteurs des œuvres de l'esprit, qu'ils soient de culture savante ou populaire.
Régulariser le secteur du droit d’auteur, une responsabilité du gouvernement
Bien des culturels affirment que le blocage est au niveau du gouvernement qui doit appuyer sur l'accélérateur car l'autorité de régulation des sociétés des droits d’auteurs ne peut être instituée qu'à l'issue du toilettage du législatif et réglementaire.
Glody Muabila, co-fondateur et actuel secrétaire général de l'ADACO , annonce la mise en place d’une commission impliquant les culturels.
‘‘Je subodore que dans les prochains jours, une commission pourra être mise en place impliquant tous les acteurs du secteur pour étudier comment assurer la transition entre le fameux monopole et la libéralisation. Et non... Parce que les artistes et autres créateurs des œuvres de l'esprit n'ont pas encore maîtrisé la quintessence des droits d'auteur. Voilà un peu le seul regret. Mais le combat continue. Il ne faudrait pas perdre de vue que depuis notre création, nous nous sommes investis d’une mission celle de mener la lutte pour la libéralisation du secteur des droits d’auteur à travers ce que j’appelle la révolution de la propriété intellectuelle’’, affirme-t-il.
Il prend l’exemple de l'enveloppe globale de la redevance de droits est estimée entre 50 et 60 millions USD plus que les budgets alloués aux ministères de la culture et du tourisme réunis. Rien qu'avec l'argent de la copie privée, beaucoup de choses peuvent changer.
‘‘S'agissant du cadre juridique, Il est indispensable pour le gouvernement congolais de rattraper le retard car une législation ne doit pas être statique, mais dynamique. La nouvelle loi doit intégrer l'aspect NTIC. C'est vraiment un impératif à l'ère du tout numérique. Imaginez-vous un peu avec un tel potentiel en création musicale, artistique et littéraires, la RDC peut contribuer d'elle-même, à travers une loi moderne et appropriée, à une amélioration substantielle des conditions socio-économiques de sa population (artistes, musiciens, etc.) et au financement de son action culturelle en tirant les ressources nécessaires de la perception des droits d'auteur sur son territoire’’, dit-il.
La gestion de droit d’auteur est l’une des raisons qui amènent les artistes à se tourner vers l’étranger, comme l’a rappelé Winnart Nsangu, artiste peintre.
‘‘Certains artistes préfèrent ne pas adhérer car les choses ne sont pas bien assises ou organisées, ils préfèrent rester comme ça ou adhérer à des sociétés étrangères pour protéger leurs créations. Il faut une réforme institutionnelle, c'est-à-dire mettre des personnes compétentes qui vont faire avancer les choses et faire que les droits d’auteur deviennent applicables. L'artiste adhère là où il y a de l'ordre et non le contraire’’, a-t-il dit.
La gestion des droits d’auteurs en RDC, qui passe par l’organisation de la Société congolaise des droits d’auteur à qui la loi reconnaît le monopole dans le secteur, reste une des préoccupations majeures du secteur culturel congolais. Lors de la table ronde organisée en juin dernier à l’occasion de la fête de la musique, la question a été largement abordée. Participants à la table ronde, le coordonnateur du Collectif des Artistes et des Culturels (CAC), Paul Le Perc, ainsi que le gérant de l’Administration de droit d’Auteur au Congo (ADACO), Junior Luyindula, ont affirmé leur besoin urgent d’améliorer la gestion ou de libéraliser le secteur. Pour l’ADACO, tant que le secteur des droits d'auteur ne sera pas libéralisé, elle continuera toujours à sensibiliser.
Emmanuel Kuzamba